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La pemphigoïde oculaire cicatricielle : une cause mal connue de cécité - 23/11/17

Doi : 10.1016/j.revmed.2017.10.235 
S. Revuz 1, , L. Charbit 2, K. Angioi-Duprez 3, S. Mohamed 1, J. Deibener-Kaminsky 1, R. Jaussaud 1
1 Département de médecine interne et immunologie clinique, CHU de Nancy, hôpitaux de Brabois, Vandœuvre-lès-Nancy, France 
2 Dermatologie, CHU de Nancy, hôpitaux de Brabois, Vandœuvre-lès-Nancy, France 
3 Département d’ophtalmologie, CHU Nancy, hôpitaux de Brabois, Vandœuvre-lès-Nancy, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

La pemphigoide oculaire cicatricielle (POC) est une maladie auto-immune rare au sein des dermatoses bulleuses auto-immunes. L’atteinte oculaire est souvent initiale et parfois exclusive, et peut être source de cécité. Son diagnostic est essentiellement clinique et immunologique. Le traitement repose sur des immunosuppresseurs, non-dénués d’effets secondaires. La morbidité est corrélée au stade de la maladie. Sa rareté est source d’errance diagnostique. Nous rapportons ici 3 cas de POC, dont le traitement systémique ne permet pas de contrôle de la maladie, parfois au prix de complications sévères.

Observation

Observation 1 : un homme de 73 ans, aux antécédents de conjonctivites récidivantes, consulte pour douleurs et hyperhémie conjonctivale bilatérales évoluant depuis 6 mois. L’examen ophtalmologique met en évidence un entropion trichiasis avec cils trichiasiques, un symblépharon, une kératite ponctuée superficielle dense et un ankyloblépharon. Le diagnostic de POC est évoqué. La recherche d’anticorps anti-espaces intercellulaires épidermiques et anti-membrane basale cutanée, d’anticorps anti-desmogléine 1, anti-desmogléine 3, anti-BP180 et anti-BP230 est négative. La biopsie du cul-de sac conjonctival met en évidence des remaniements cicatriciels sans dépôt en immunofluorescence. Les diagnostics différentiels (auto-immunes, infectieux, locaux) sont écartés. Aucune autre atteinte systémique ou néoplasie solide n’est trouvée. Un traitement par Dapsone et corticothérapie est instauré, puis ajout de cyclophosphamide par voie intraveineuse après traitement d’une infection pulmonaire. L’évolution est dominée par de multiples complications iatrogènes : diabète cortico-induit, 3 complications infectieuses sous la forme de pneumopathies (recours à la ventilation mécanique pour l’une). Sur le plan de la POC : absence d’amélioration avec ankyloblépharon restant très inflammatoire, entropion rétractile et ulcère nasal, baisse d’acuité visuelle jusqu’à la quasi-cécité bilatérale. Le traitement est alors changé pour du rituximab intraveineux, associé à un traitement par ciclosporine locale, permettant une réduction des signes inflammatoires et une légère amélioration de l’acuité visuelle à 1/10e. Observation 2 : Une patiente de 69 ans est adressée pour panuvéite dans un centre tertiaire. Depuis 6 mois, elle présente une hyperhémie conjonctivale bilatérale associée à un chémosis. Le traitement consiste en une corticothérapie systémique. L’évolution est défavorable avec l’apparition, à 4 mois, d’une inflammation du segment antérieur associant blépharite, néovaisseaux et fibrose conjonctivale avec symblépharons. L’acuité visuelle est à 8/10e. Le diagnostic de POC est retenu sur ces critères cliniques et la positivité des anticorps anti BP180. La biopsie de la conjonctive met en évidence un infiltrat plasmocytaire. Aucune néoplasie n’est identifiée. Un traitement par Dapsone 100mg/jour et cyclophosphamide par voie intraveineuse est ajouté. L’évolution est défavorable avec inflammation conjonctivale sévère, fibrose conjonctivale rétractile, réaction conjonctivale limbique et hyperhémie conjonctivale diffuse avec néo-vaisseaux cornéens limbiques, symblépharon temporal conduisant à un intensification thérapeutique par cyclophophamide per os. Il n’y a aucune amélioration clinique avec une acuité visuelle à 4/10e. Il n’y a aucune complication infectieuse. Observation 3 : un homme de 86 ans, consulte pour une hyperhémie conjonctivale, une inflammation périorbitaire et une baisse de l’acuité visuelle évoluant depuis un mois. L’examen ophtalmologique objective : une acuité visuelle à 1/10e à gauche et compte des doigts à 1 mètre à droite ; conjonctive fibrosante avec comblement du cul de sac inférieur et symblépharon nasal ; éversion de la paupière supérieure ; trois ulcères à fond propre et kératite controlatérale. Une biopsie conjonctivale montre un infiltrat lymphoplasmocytaire. L’étude en immunofluorescence n’est pas contributive. Le bilan immunologique est négatif. Un traitement par Dapsone 50mg/jour est introduit. L’évolution est marquée par une aggravation (il voit bouger les doigts de manière bilatérale). La posologie de la Dapsone est augmentée. Il est décidé de ne pas recourir à des immunosuppresseurs en raison des comorbidités et de l’état général du patient.

Conclusion

La POC est une conjonctivite fibrosante auto-immune de l’adulte, dont le diagnostic est clinique. C’est une cause rare et méconnue de cécité. Son traitement repose sur des immuno-suppresseurs. Il est urgent de la reconnaître et la traiter car son traitement est difficile et limité par les effets secondaires et les comorbidités des patients.

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Vol 38 - N° S2

P. A224 - décembre 2017 Retour au numéro
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